LE PERSONNAGE DE TRAVIS BICKLE

Le personnage de Travis Bickle a été en partie crée par le scénariste Paul Shrader, qui s'est probablement inspiré de l'Oeuvre de Dostoïevsky et de La Nausée de Jean-paul Sartre. Scorsese parle aussi à ce sujet du lien entre son film et Dostoïevsky :

"J'avais lu les mémoires écrites dans un souterrain de Dostoïevsky quelques années avant et je voulais faire un film; et Taxi driver est celui qui y ressemble le plus"

Martin Scorsese a fortement été influencé par Dostoevsky, il s'inspire du joueur pour le film Casino(1996) C'est par le biais de ces inspirations que l'on peut retrouver chez le personnage un aspect existentialiste, des angoisses, des obsessions et des pulsions de mort. Le but d'un passage à l'acte (la fusillade de la fin du film) chez Bickle le relie à l'existentialisme qui soutient que "on est ce qu'on fait". Ainsi la réalisation des pensées est une manifestation du personnage qui veut exister.

Un des éléments principaux, qui remodèle la psychologie de Bickle, est qu'il revient de la guerre du Viêt-nam. Il en est très marqué et a perdu ses marques de retour aux États Unis. Dans Scorsese par Scorsese des cahiers du cinéma, le réalisateur souligne l'importance du traumatisme du vietnam pour Bickle:

"Travis Bickle est traumatisé par le Vietnam, c'est resté en lui et soudain ça explose.[...] il était crucial que le personnage de T. Bickle ait connu la vie et la mort à chaque seconde de son séjour en Asie du Sud-est. Ca amplifie tout quand il revient ; l'image de la rue qui se réflète dans un caniveau devient inquiétante."

Tout au long du film cette blessure psychologique va en s'accentuant, entraînant Bickle dans une forte paranoïa. La ville de New York elle-même contribue à la montée des angoisses chez Bickle, le plongeant dans des affres. Scorsese explique :

"Je ne crois pas qu'il y ait une difference entre fantasme et réalité dans la manière dont on aborde ces choses la dans un film. Bien sur, si on vivait de cette façon, on serait des malades mentaux, mais au cinema, on peut oublier cette frontière. Dans Taxi driver, Travis Bickle, vit de cette façon, il va jusqu'aux dernières limites et explose."

Le réalisateur ajoute qu'il accepte de travailler dans tous les quartiers (avec son taxi) car cela nourrit sa haine. La déception amoureuse avec Betsy marque un tournant dans le film, et conforte le personnage dans sa révolte. Suite à tous ces échecs pour se rattacher à quelquechose, éliminer son malaise, il sombre dans une dure solitude, (deja présente dès le début du film). En particulier, sur l'Affiche du film, était écrit : " Dans chaque ville, il y a un homme." C'est à partir de ce moment que le malaise s'amplifie dans le personnage, la ville agissant sur lui, réveillant en lui ses obsessions et traumatismes. Bickle devient encore plus opressé et frustré, ce qui aurait pu conduire à une autodestruction.

La révolte gronde en lui, et l'état de la ville, qu'il sillonne toutes les nuits à bord de son taxi, le dégoutte. Il en fait part au candidat à la présidence Charles Palantine, qu'il tentera d'assassiner par la suite. Scorsese explique ici la relation fantasme-réalité dans le film :

"la clé du film, c'est l'idée qu'il faut être assez courageux pour accepter ses propres sentiments et les transformer en actes." Travis Bickle passera justement à l'acte, et se transformera en ange exterminateur ; Scorsese précise le personnage: "Mais il faut bien comprendre que Travis a les meilleures intentions du monde : il croit bien faire, comme Saint Paul. Il veut donner un grand coup de balai dans l'existence, laver son esprit, purifier son âme, c'est un mystique [...] c'est la toute puissance de l'esprit, mais sur le mauvais chemin." Travis sera allé jusqu'au bout, mais la question persiste si il s'est vidé de ses passions ou si il cultive toujours de pénibles souffrances et un dur malaise.

En outre, la complexité de Travis, se situe dans ses aspects contradictoires : il peut faire part de tendresse (avec Iris), mais aussi montrer de l'ironie (avec l'agent de securité de Palantine). Au contraire, son comportement avec Betsy est teinté de naïveté ; Travis est en quelque sorte perdu.

La figure de Bickle correspond à une vision de New York et plus généralement de l'Amérique, suite à la guerre du Vietnam qui a laissé un choc certain dans la population.

 

 

 

Quelques photos montrant l'évolution du personnage de Travis dans le film :

 

 

 

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